Le vin, ça fait rire.

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Témoignage par Catherine

J’avais 3 ans, peut-être 4 quand j’ai dit ça. Je me rappelle encore des odeurs, des couleurs… C’est le temps des Fêtes. Il fait chaud, quand même. Je viens d’une grosse famille. Et je me rappelle que ce soir-là, je les ai TOUS fait rire. Ils m’en parlent encore aujourd’hui! C’est ma première expérience positive avec l’alcool.

Ancrer dans ton cerveau dès l’âge de 3-4 ans que le vin, ça fait rire. Non seulement ça, mais être validée par ceux qui t’élèvent.

Comme enfant unique avec peu de cousins/cousines de mon âge, je passais le plus clair de mon temps entourée d’adultes. J’ai vite appris la routine. Au chalet, c’était la bière. Au souper, c’était le vin. Aux Fêtes, c’était le gin. Dans le sud, c’était le rhum. J’ai eu la chance de grandir dans une famille festive, assez aisée, où l’alcool a toujours été synonyme de plaisir. Pour moi, un père alcoolique, c’est un père aimant qui fait rire tout le monde.

Ça m’a pris du temps à « aimer le goût » de l’alcool. C’est un goût qui se développe, qu’on me disait. Mais comme j’avais pas de temps à perdre, j’ai décidé que les drogues étaient franchement plus efficaces, côté goût ET effet.

J’ai pas d’histoire épouvantable à raconter, malgré le fait que pendant 2 ans au début de l’âge adulte, je prenais 1 speed par jour. Je pesais moins de 100 livres et je n’avais plus de règles. MAIS, j’avais toujours un emploi de bureau, de 9 à 5. Alors tout était « normal », tsé. Par contre, vers l’âge de 25 ans, j’ai décidé qu’il était temps d’arrêter le party et de devenir une vraie adulte.

Vous me croirez peut-être pas, mais c’est là que la dérape a commencé.

En tant que « vraie adulte », je me suis mise à aller dans les bars au lieu des after-hours. À faire des soupers bien arrosés entre amis. C’est ça que les vrais adultes font, non? Mes parents étaient fiers : je faisais enfin quelque chose de ma vie. J’avais lâché la drogue.

Je passais aussi du temps seule à la maison. À cuisiner avec du vin. À me soûler par accident, comme j’aimais si bien le dire.

J’étais cool, tsé. Je travaillais en marketing, je voyageais de congrès en congrès, alors boire sur la job, c’était juste normal. Boire et rester en contrôle, c’était ça, ma vie. Et je m’en suis vantée longtemps.

Je pouvais boire avec les hommes, COMME les hommes.

Je prenais mon auto après une bouteille, 2 bouteilles, sans me poser de questions. J’étais en contrôle, plus forte que tout le monde. Et je dois le dire aujourd’hui : j’ai eu la chance au derrière.

Je me suis collée au « plus soûlon de la gang ». Vous savez, celui qui se fait mettre dehors du bar parce qu’il s’est endormi sur la piste de danse? Celui qui encaisse les bières une après l’autre mais qui reste cool, pas violent, et qui finit juste par passer out. Celui qui a dit, quand j’ai porté notre premier enfant en 2014, qu’il arrêterait de boire. Il tient toujours sa promesse aujourd’hui.

J’ai eu plusieurs épisodes de sobriété, particulièrement quand mes enfants étaient des bébés. J’ai surpris les gens que j’ai rencontrés durant cette période en leur racontant mon passé. Pourtant, t’as tellement pas l’air de ça!

Je l’ai bien caché mon jeu, n’est-ce pas? Mais pourtant, j’en portais les traces. Les crises de panique à répétition, l’anxiété généralisée, les « voix » qui chuchotaient derrière mon dos lors des périodes d’anxiété particulièrement intenses… Mon chum l’a vu, ça. Mais pas les gens.

Quand mes enfants se sont mis à grandir et que ma vie sociale est « revenue », le vin a refait son apparition avec le fun. Oh que les enfants étaient plus faciles à gérer avec une bouteille dans le corps! Finalement, un verre de vin le vendredi soir, ça peut faire de mal à personne! Avec la mode des « mères indignes » sur Internet, j’ai bien vu que j’étais pas la seule à boire ma bouteille pour mieux supporter mon rôle de maman. Et je dois le dire, c’était pas mal réconfortant.

Mes enfants n’ont jamais manqué de rien. Ni de bouffe, ni de soins, ni d’affection. Ils avaient (et ont toujours) des parents présents, ne se sont jamais fait garder un samedi soir. Mais ils avaient une mère absente, même si elle était là. Et ça me crève le cœur d’écrire ces mots aujourd’hui.

Le petit verre du vendredi soir s’est transformé en quelques bouteilles par fin de semaine. Mais je faisais pas le party comme avant, j’étais au lit à 21h alors il est où, le problème?

Et ça a commencé sournoisement. Je me suis réveillée au beau milieu d’une nuit, sans aucune raison, avec un rythme cardiaque de plus de 100 BPM. Incapable de me rendormir, anxiété dans le tapis. C’est Docteur Google qui m’a expliqué qu’en effet, l’alcool augmente le rythme cardiaque environ 6 heures après ta dernière consommation.

Ces réveils nocturnes se sont mis à se multiplier. Je me suis mise à lire sur l’intolérance à l’alcool, sur l’effet direct qu’il a sur la santé cardiaque. Sans le savoir, je me suis mise à m’éduquer et c’est précisément ce qui m’a sauvée.

J’ai fait des tests avec ma montre intelligente. Ah, tiens donc, quand je ne bois pas, mon cœur conserve son rythme normal de 50-60 battements minute. J’ai eu des conversations avec moi- même. J’ai décidé de prendre un pause.

Pause qui s’est rapidement transformée en mode de vie.

Je ne compte plus les lumières qui se sont allumées dans mon cerveau depuis. J’ai découvert en moi une personne que je ne connaissais pas. Plus motivée, plus empathique, moins colérique, MOINS ANXIEUSE. Meilleure maman, meilleure amoureuse, meilleure amie.

Le travail personnel que j’ai fait depuis les dernières années a commencé à payer le jour où j’ai sorti l’alcool de ma vie. J’ai compris qu’en consommant, j’ai juste retardé le vrai rendez-vous avec moi-même.

Devenir sobre, c’est revenir aux sources, à notre vraie raison d’être. Aujourd’hui, je suis fière de partager mon parcours et de participer à ce mouvement qui normalise la sobriété.

Je suis la preuve vivante que même la plus grande fille de party préfère la sobriété quand elle l’accueille de façon consciente.