Témoignage par Stéphanie P.
J’étais en train de crever, j’avais peur de mourir, je me sentais mourir. J’ai frappé mon mur, le 6 juin 2018.
En confinement, le vendredi 1er mai 2020
Je m’appelle Stéphanie, je suis une alcoolique en rétablissement.
Je soulignerai – je n’écrirai pas célébrer parce que je ne sais pas encore tout à fait comment le faire – mon deux ans d’abstinence sous peu. Le 7 juin 2018 est le premier jour de ma nouvelle vie. Le premier jour de mon relèvement d’un trouble de dépendance. J’ai demandé tellement fort de m’aider qu’on m’a entendue. J’étais en train de crever, j’avais peur de mourir, je me sentais mourir. J’ai frappé mon mur, le 6 juin 2018.
Je suis entrée en thérapie fermée le 25 juin 2018, pour 28 jours, à la résidence Le portail. Lors de mon arrivée j’étais abstinente depuis 19 jours. Ne me demandez pas comment j’y suis parvenue, je ne sais pas. Je me suis laissée porter par une force plus grande que moi. Je voulais profondément m’en sortir.
Le lendemain de mon arrivée, je devais écrire une lettre d’adieu à ma substance. C’est cette lettre que j’ai envie de partager, aujourd’hui. Plusieurs autres ont suivi… des lettres de pardon, d’amour et d’autres lettres d’adieu… et à l’aube de mon deux ans d’abstinence, j’ai envie de partager celle-ci avec vous, avec toi qui en a peut-être besoin. Parce que moi ce qui me réconforte et qui m’aide tous les jours à continuer d’avancer dans ce cheminement, ce sont des témoignages, des histoires inspirantes.
26 juin 2018 – Québec, Le Portail, centre thérapie pour femmes en dépendance
J’ai commencé à te côtoyer tous les jours il y a 15 ans. Tu m’as appris à trouver la paix. Quand j’étais avec toi, j’avais une pause dans ma tête…
Tu es entrée dans ma vie j’étais encore adolescente, j’avais beaucoup de plaisir avec toi. Tu étais comme un ‘’pot’’ qu’on voit à l’occasion mais qu’on est toujours heureux de retrouver.
Plus tard, tu m’as consolée, tu as comblé un vide, une solitude, un manque d’amour. Jamais tu ne m’as contredit, tu m’écoutais et me comprenais. Je croyais en toi. J’ai commencé à te côtoyer tous les jours il y a 15 ans. Tu m’as appris à trouver la paix. Quand j’étais avec toi, j’avais une pause dans ma tête…Tout ce que je voulais c’est que ça arrête de crier si fort. Avec toi, j’avais la foutue PAIX !
Je t’ai quittée quand j’ai appris que j’étais enceinte de mon magnifique garçon qui a maintenant 7 ans. Je dois t’avouer que tu ne m’as pas manquée. Je me sentais bien et libre sans toi.
Il y a 5 ans je t’ai croisé, nos retrouvailles se sont faites douces et lentes. Jusqu’à ce que je me sente seule, que je ne me trouve pas à la hauteur, que je veuille que ça arrête de crier si fort dans ma tête. Tu as été fidèle, tous les jours, tu n’avais plus de fin…tu étais toujours là, jusqu’à ce que je m’endorme.
C’est assez. J’ai décidé de t’embarrer dans une petite pièce noire et t’y laisser seule. J’ai fermé la porte et j’ai jeté la clé.
Et il y a 20 jours j’en ai eu marre de toi. J’ai frappé un mur, je me suis écroulée. C’était assez! La honte, la culpabilité, la tristesse. Le retour à la case départ chaque jour, les vomissements pour t’expulser de mon corps, ton goût et ton effet dévastateur qui minait ma vie, c’était assez. C’est assez. J’ai décidé de t’embarrer dans une petite pièce noire et t’y laisser seule. J’ai fermé la porte et j’ai jeté la clé.
C’est fini.
Je vais me reconstruire sans toi. Des amies comme toi, je n’en veux plus. Je n’ai plus besoin de toi pour rire. Je serai une meilleure personne, une meilleure maman, une meilleure amoureuse …sans toi.
Tu es maudite.
Mais dieu merci, j’ai décidé de te quitter avant que tu finisses par m’achever.
Stéphanie