L’ivresse de la minceur

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Beaucoup de gens me demandent comment c’est de vivre avec un trouble alimentaire.

C’est comme si tu ne vivais pas réellement, en fait. Comme si chaque mouvement, chaque action étaient contrôlés par quelque chose de plus grand que toi qui ne fait que t’envahir. Ce n’est pas un corps parfait non plus. Vivre avec ce fléau c’est avoir un sentiment constant de ne pas être à la hauteur. L’anorexie, ce n’est pas sauter un repas de temps en temps ou trouver qu’on a quelques livres en trop; c’est toujours avoir froid, c’est perdre des cheveux, c’est des malaises inexpliqués, c’est un sentiment constant de dégoût… Un mal intérieur qui ne veut pas te laisser tranquille, qui te suit à chaque pas de ta misérable vie. Malgré tout, tu chéris cette maladie, en sachant au plus profond de toi que ce n’est qu’une mort lente, qu’elle ne veut que ta peau.

La boulimie ce n’est pas se sentir mal après avoir mangé un peu plus qu’à l’habitude, mais bien passer des heures dans la salle de bain pour être sûr que tout ce que tu as mangé n’est plus là, le visage enflé et en pleurs, priant pour que ce chaos cesse. C’est cracher du sang, c’est un mal de gorge constant, une destruction graduelle de tes organes intérieurs… C’est une maladie qui se développe, une escalade envahissante vers l’obsession d’un corps parfaitement imparfait et malade. Et ce sentiment ne sera jamais assouvi; il ne cessera jamais de créer un vide de plus en plus grand face à un désir jamais comblé.

Nous sommes tellement engloutis dans ce mode de vie que notre trouble alimentaire devient notre vie entière, nous éloignant de tous les gens qu’on aime, des sorties entre amis, des relations amoureuses, des petits bonheurs de la vie qui nous sont retirés.

Tu te retrouves seul avec tes pensées te disant de perdre du poids, seul à les écouter. Tu deviens tranquillement ta maladie, pensant qu’elle est toi. En vérité, tout est de plus en plus noir et le simple fait de vivre devient un fardeau.
C’est une descente aux enfers que tu ne peux pas contrôler par toi-même.

C’est le moment d’aller chercher de l’aide, mais c’est une aide qui ne sera jamais la bienvenue parce qu’au fond de toi, tu aimes être comme ça. Ça te fait l’effet d’une couverture chaude durant une soirée froide d’hiver, tellement confortable que de te défaire de celle-ci te fait peur : mais c’est une action que tu dois poser pour pouvoir te sentir mieux. C’est un combat qui en vaut le coup, au moins essaye…

Il y a des gens autour de toi qui s’inquiètent, qui ne veulent que ton bien, qui veulent te voir sourire, te voir être heureux. Ce ne sera pas toujours facile, je le sais, car moi aussi je suis sur cette route, mais je me sens de mieux en mieux.

Je m’appelle Alexie et je suis une anorexique et boulimique en rétablissement.