Témoignage par Claudine S.
Je ne voyais que noir, aucune zone grise, même pas noir pâle, NOIR, comme le noir de la mort.
Le début d’année fût très difficile et intense en émotions. Je prends de la médication depuis plus de 5 ans maintenant suite à une dépression, qui avait aussi mené à un diagnostic de bipolarité. Le hic c’est que tu n’es pas vraiment censé prendre la « médic » pendant des années, et comme je suis incroyablement organisée…. Je ne me suis jamais occupé de faire un suivi. En janvier 2018, ma médication était terminée et j’étais finalement obligée de consulter. On a baissé ma dose de moitié parce que le médecin du sans rendez-vous trouvait que ma médication ne faisait pas de sens…une idée de génie ! J’avais l’impression de revivre mes débuts de sobriété. Sevrage intense, sueur etc. Je suis vite retournée à ma dose ”normale”, parce que les semaines suivantes ont probablement été les pires de ma vie. La douleur s’est installée dans mon âme, comme si le démon lui-même aspirait tout mon intérieur pour m’emmener avec lui. Je ne voyais que noir, aucune zone grise, même pas noir pâle, NOIR, comme le noir de la mort. Je dois avouer que j’ai pensé à consommer, me geler la souffrance, me creuser un trou pour m’enfoncer dedans.
J’ai un petit humain qui a besoin de moi et je ne voulais pas qu’il grandisse en pensant que sa maman l’avait abandonné.
Mais j’ai passé au travers. Je savais que la rechute n’était pas la solution, je devais m’occuper de Léonard, mon garçon. Je ne voulais pas lui faire vivre ma débauche. J’avais besoin de changer le mal de place, de me débarrasser du diable qui m’envahissait. J’ai donc décidé, de le changer pour vrai. À cet instant-là, les cicatrices que j’ai incrustées sur mon corps, sont venues mettre un baume temporaire sur mon désespoir. Assise dans ma salle de bain, rasoir à la main, à essayer de ”geler” ma douleur autrement que de me « crisser » de la coke dans le nez. La première fois ça brûle, le sang coule et on essaie de retenir nos hurlements. Les fois d’après c’est presque un rituel, une préparation pour notre séance anti-douleur. Certains ont été mis au courant dès la première coupure. Probablement un appel à l’aide de ma part. J’ai mis moins de temps pour demander de l’aide et avouer ma déchéance cette fois. J’ai un petit humain qui a besoin de moi et je ne voulais pas qu’il grandisse en pensant que sa maman l’avait abandonné. Je me suis rendue à l’hôpital Albert-Prévost, un endroit pour les cas psychiatriques, pour demander de l’aide. J’ai rencontré des psychiatres, médecins, infirmières etc. Et j’ai passé une batterie de tests qui ont résulté en diagnostic de trouble de personnalité, Borderline.
Depuis ce jour, chaque mercredi de 13h30 à 15h30 j’apprends à vivre avec mes émotions, j’ai des outils en cas de détresse, mes zones de noirceur ont quitté, la douleur et l’anxiété est presque inexistante.
À l’école je ”scorrais” pas haut mais là, j’ai topé le max ! Ils m’ont mentionné qu’un programme était offert, en groupe, pour les gens qui ont le même problème et que celui-ci serait parfait pour moi. J’ai dit oui immédiatement. J’ai commencé mercredi le 14 février 2018, la journée de l’amour. L’amour pour soi quand j’y pense maintenant. Depuis ce jour, chaque mercredi de 13h30 à 15h30 j’apprends à vivre avec mes émotions, j’ai des outils en cas de détresse, mes zones de noirceur ont quitté, la douleur et l’anxiété est presque inexistante. Je peux dire haut et fort que je m’aime et que je suis fière de moi. Mes cicatrices sont moins visibles et quand je les regarde je sais que je ne veux pas retourner là. Mercredi le 13 juin passé, c’était ma dernière séance de thérapie. Fébrile et heureuse, mais à la fois triste que le tout se termine. Mon coffre d’outils est gros et les ressources sont présentes. Je suis libre et sereine, j’ai vraiment confiance pour la suite. Je suis libre parce que j’ai réussi à chasser le noir pour du blanc foncé, le blanc trop pur c’est salissant…
Aujourd’hui je célèbre 4 ans de sobriété et j’ai encore de la misère à le croire ! J’ai un fils incroyablement adorable, avec qui je redécouvre la vie. J’avais le goût de te raconter tout ça parce qu’on ne sait jamais qui peut être en train de vivre la même chose. Je partage aussi parce que je suis bien avec qui j’étais et qui je suis. Je ne suis pas à l’abri de rien, mais d’en parler c’est de s’aider. C’est d’avancer.