La conquête du prince

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Texte anonyme

C’était bien d’adon car je me sentais le cœur rempli de slush brune et c’est exactement en cette journée que mon corps a accueilli un vide sans fin.

J’ai 14 ans lorsqu’on m’apprend que mon faux-papa-trash est mort. Celui que j’ai adopté comme mon premier prince charmant n’est plus, déjà. C’était un mardi soir d’hiver et la slush brune couvrait le toit de ma maison au complet. Y’a des fois où je trouve ça beau de la neige blanche, pis d’autres fois, je trouve ça laid. Au fond, l’état de la neige vient juste te faire réaliser que la vie est pas toujours belle et pure. Anyway, tout ça pour dire qu’on irait que la température avait eu de la compassion pour moi ce mardi-là. Comme si elle s’était dit qu’elle allait m’accompagner métaphoriquement, à l’image de comment était mon paysage intérieur. C’était bien d’adon car je me sentais le cœur rempli de slush brune et c’est exactement en cette journée que mon corps a accueilli un vide sans fin. La mort m’est rentrée dedans. Elle s’est infiltrée en moi en me laissant sans mots.

La mort de mon papa aura été le commencement de la conquête d’un futur prince qui allait me sauver et  réparer  le vide que j’avais de « pogné » dans le bedon. Mon allié numéro un, à l’époque, était l’alcool. Mon allié numéro 2 était les bars et mon allié numéro 3 était que j’attire l’homme qui se crisse totalement de moi pour être bien certaine de réussir ou échouer mon objectif. Au choix. J’ai réussi avec brio dès ma première tentative. Bien étourdie par les shooters, je frenche un homme sur la piste de danse qui me dit à l’oreille qu’il va me ramener chez lui. Je l’entends rire de moi, au loin avec sa gang de chums virils.Moi, je continue à boire mes shooters, pour pas sentir l’humiliation qu’il allait me faire vivre pour recevoir un peu d’affection. En arrivant chez lui, il m’insulte par rapport à mon poids, me traite de grosse cochonne et m’avoue avoir gagné un pari avec ses amis. Il me dit qu’il veut bien me garder à coucher, pareil. Yeah ! J’ai l’impression d’avoir gagné le jackpot donc je passe par-dessus les non-respects de Monsieur X. 1-0 pour moi, que je me dis. Je repars la tête haute en me disant que maintenant, je sais comment obtenir l’attention d’un homme.

J’offrais mon cul, mes fellations, mon ouverture d’esprit sexuelle et mon écoute attentive pis en échange il me faisait croire que j’existais. Wow. Big Deal.

Après avoir attendu près de mon téléphone pendant une semaine avec la conviction qu’il allait s’ennuyer de moi, je décide de repartir à la conquête de ma prochaine cible. Celle-ci à été plus raide à digérer. Après m’avoir amenée chez lui dans un village complètement perdu à 2 heures de Montréal, il est venu me reconduire dans un stationnement et m’a demandée gentiment de me débrouiller pour retourner chez moi, car il avait des occupations. Bang! 1-0 pour Monsieur V pour viril! J’ai marché en petite jupe sous la pluie durant des heures et des heures en m’accrochant à l’idée qu’il allait sûrement me rappeler donc j’aurais à nouveau de l’affection. Le calcul est simple dans ma tête, ça vaut la peine! Mais mon répondeur a continué de me faire la baboune.

À chaque fois, à chaque conquête je tombais de haut mais j’avais cette force et mon instinct me disait qu’un jour j’allais réussir. Mais réussir quoi? J’ai senti que ma vie allait avoir un nouveau sens lorsque j’ai catché que je pouvais facilement obtenir un billet gratuit pour l’accès aux hommes. Facile.J’offrais mon cul, mes fellations, mon ouverture d’esprit sexuelle et mon écoute attentive pis en échange il me faisait croire que j’existais. Wow. Big Deal. Un gros rabais sur l’estime de soi! Dieu que j’étais belle et sexy quand un homme me renvoyait cette belle image de moi, une fille tellement ouverte, tellement cool et easy going. Ce n’est qu’après un mince 15K$ d’investissement avec une psy que j’ai commencé à saisir le mot respect de soi-même.

Mais comment pouvaient-ils me respecter si moi-même je ne me respectais pas?

En ce moment, je suis pas mal certaine qu’il doit y en avoir des hommes qui se bombent le chest fièrement en se vantant que j’ai été amoureuse d’eux. Pauvre gars, j’ai tellement été fake avec eux. J’ai tellement joué de jeux. Je leurs disais exactement ce qu’il voulait entendre. Facile. Quand tu cibles un narcissique à l’égo démesuré, demande-lui qu’il te parle de lui, tu l’as directement dans ta poche. Quand tu rencontres un homme qui vient de se séparer, rassure-le et dis-lui que tu comprends ce qu’il vit. De la grosse bullshit. À défaut de ne pas avoir réussi ma carrière d’actrice tel que je l’aurais voulu, j’ai bien réussi mon acting out avec les hommes. Il y en a eu des gars, définitivement trop et tous très différents! Des petits, des grands, des cheveux courts, des cheveux longs, des hommes qui ont voulu enfouir leur queue dans ma bouche sans aucun respect, souvent.Mais comment pouvaient-ils me respecter si moi-même je ne me respectais pas? J’ai connu des hommes mariés, des narcissiques, des hommes en quête de sens, des hommes à femmes, des gais pas assumés, des gars pas gentils, des gars hyper intelligents, des musiciens, des gars tellement trop gentils, des vieux garçons qui ont eu peur de l’engagement, des hommes qui m’auraient décroché la lune. Mais ceux-là, ils me tapaient sur les nerfs. C’était un manège trop plate, moche et ennuyant.

Honnêtement, ce serait me mentir que de dire que cette blessure d’abandon va disparaître. Par contre, je vais apprendre à vivre avec elle et conjuguer le verbe « aimer » avec moi-même.

Ça sonne trash mais la beauté de mettre des mots sur tout ça, c’est qu’aujourd’hui, j’apprends à me pardonner profondément d’être allée vers tous ces hommes-là. L’objectif n’est pas de les détester ou de les accuser. J’ai ma part de responsabilités. Je dois simplement me pardonner d’avoir fait des mauvais choix dans ma vie affective et me pardonner de ne pas m’être choisie.

J’arrive de loin. Il y a forcément une raison à toute cette quête que j’avais entreprise avec les hommes dans ma vie… Aujourd’hui, j’avoue que je me comprends mieux, je fais de meilleurs choix.Honnêtement, ce serait me mentir que de dire que cette blessure d’abandon va disparaître. Par contre, je vais apprendre à vivre avec elle et conjuguer le verbe « aimer » avec moi-même.

Laissez-moi vous raconter d’où je viens et vous allez mieux comprendre vers où je vais maintenant.